ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES

Femmes et formations professionnelles : où en est-on ?

Compte rendu de la plénière du RREFH du 4 octobre 2018

Comment se présentent les dépenses liées aux dispositifs de formation professionnelle continue ? Qui bénéficie de ces dispositifs ? Quels sont les freins rencontrés par les femmes dans l’accès à ces dispositifs ? Quelles pistes opérationnelles d’actions pourraient être développées pour limiter les effets inégalitaires et garantir un accès égal à la formation professionnelle continue ?

Autant de questions auxquelles Mme Catherine Smadja-Froguel (du secrétariat général des ministères économiques et financiers) a apporté des réponses lors de la 3e conférence trimestrielle du Réseau régional pour l’égalité entre les femmes et les hommes (RREFH) sous le thème « Femmes et formations professionnelles : où en est-on ? » qui a eu lieu le jeudi 4 octobre 2018 à l’Hôtel de préfecture de Marseille. Mme Smadja-Froguel a présenté quelques éléments issus du rapport « Faire d’un système rénové de formation professionnelle un outil majeur d’égalité au travail entre les femmes et les hommes » qu’elle a remis en février 2018 à Marlène Schiappa, Secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes.

1. La formation professionnelle en chiffres

Près de 24,9 Mds d’euros de dépenses pour la formation professionnelle
Ce montant représente 1,1 % du PIB, hors dépenses directes des entreprises de 10 salariés ou plus (estimées à 6,3 Mds d’euros en 2014). Près des deux tiers (62 %) des dépenses concernent la formation en elle-même, le reste (38 %) est lié à la rémunération des stagiaires.
Les dépenses les plus importantes proviennent des entreprises qui abondent en moyenne pour 31 % du budget de la formation professionnelle, soit deux fois plus que l’État ou les Régions.

Les apports de la formation professionnelle continue dépassent largement son coût
Le taux d’accès à l’emploi et aux postes élevés des personnes discriminées rapporterait 7 % du PIB soit environ 150 Mds d’euros de gains économiques auxquels les femmes contribueraient à hauteur de 97 %.

Graphique 1 : Financement de la formation professionnelle continue

RREFH Graphique 3

Les entreprises investissent davantage en matière de formation professionnelle que la loi ne les y oblige. Elles consacrent 2,67 % de leur masse salariale à la formation au lieu de 1,6 % en 2014. Cependant, entre 2009 et 2014 on constate une tendance à la baisse constante où ce pourcentage atteignait 2,75 %.
Depuis la réforme de 2014, les contributions obligatoires des entreprise de plus de dix salariés passe à 1 % et celles en dessous de dix salariés à 0,55 % en excluant les dépenses directes.
La part de financement varie selon les publics concernés. Si les formations pour les jeunes sont dans la majorité des cas financées par les Régions, les formations des demandeurs d’emploi sont quant à elles généralement financées par Pôle emploi.


Près de 24,9 millions de stagiaires en formation professionnelle
Les trois quart d’entre eux sont des salariés, les autres sont soit des demandeurs d’emploi ou des personnes qui financent elles-mêmes leur formation.

Graphique 2 : Statut des bénéficiaires de la formation professionnelle continue
RREFH Graphique 2

Quand on observe les budgets consacrés à la formation, la répartition semble être différente : 60 % des dépenses bénéficient aux salariés (43 % de salariés du secteur privé et 17 % de salariés du secteur public), 15 % aux demandeurs d’emploi, 18 % à des apprentis et 7 % à des jeunes en insertion professionnelle.

Graphique 3 : Répartition des dépenses consacrées à la formation professionnelle continue selon le statut des bénéficiaires
RREFH Graphique 1

2. L’accès à la formation est inégalitaire

Les différents dispositifs de formation continue incluent le plan de formation, le congé individuel de formation, les contrats et périodes de professionnalisation, le compte personnel de formation, le conseil en évolution professionnelle, le contrat d’apprentissage et les congés spécifiques de formation pour des fonctions particulières.
L’accès à ces dispositifs est différencié selon l’âge, la taille de l’entreprise le sexe ou le niveau de formation. Il est favorable aux :

  • Jeunes  : entre 25 et 54 ans une personne en emploi sur deux a participé au moins une fois à une formation contre une sur trois pour les personnes entre 55 et 64 ans.
  • Hommes : le taux d’accès à la formation des hommes est de 45 % celui des femmes s’établit à 43 %.
  • Diplômés  : 66 % des personnes ayant un niveau supérieur à bac + 2 ont eu accès à une formation contre 25 % des personnes n’ayant aucun diplôme.
  • Cadres : 68 % des cadres ont eu accès à une formation contre 37 % des ouvriers.
  • Dans les grandes entreprises : un tiers des salariés des entreprises de 10 salariés ont eu accès à une formation contre les deux tiers des salariés dans les entreprises d’au moins 250 salariés.


Un quart des stagiaires en période de professionnalisation sont des femmes
La présence des femmes varie selon les différents dispositifs de formation. Elles rassemblent ainsi près des deux tiers des stagiaires en congés de bilan de compétences et trois quart des stagiaires en congés de validation des acquis de l’expérience (VAE).
A contrario, elles ne représentent qu’un quart des stagiaires en période de professionnalisation.
Les congés individuels de formation, le compte personnel de formation, le contrat de professionnalisation et le plan de formation, représentent une mixité équilibrée accueillant autant d’hommes que de femmes.

Dans les entreprises, les femmes bénéficient moins de formation
Dans les grandes entreprises où la formation est plus aisément monnayable en termes d’évolution de carrière, 59 % des hommes suivent une formation contre 52 % des femmes.
Selon les catégories socioprofessionnelles, les femmes cadres accèdent moins que les hommes aux dispositifs de formation professionnelle continue (57 % contre 62 % des hommes). En revanche, les professions intermédiaires sont la seule catégorie où les femmes se forment plus, mais souvent, il s’agit des formations courtes et obligatoires.
Si la durée moyenne par stagiaires des cours et stages financés par les entreprises est globalement équivalente pour les femmes et pour les hommes, la valorisation financière de la formation est plus favorable pour les hommes :

  • 6,7 % des femmes bénéficient d’une augmentation de salaire après une formation contre 8,5 % des hommes.
  • 11 % des formations suivies par les hommes préparent à un concours ou un examen contre 4 % de celles suivies par les femmes.
  • 21 % des formations suivies par les hommes et 13 % de celles suivies par des femmes visent un diplôme ou une qualification reconnue.

Elles sont plus enthousiastes à suivre une formation, mais on le leur propose moins

  • 41 % des hommes contre 35 % des femmes reçoivent une information sur les formations de leur hiérarchie.
  • 63 % des femmes et 68 % des hommes ont eu droit à un entretien professionnel dans les deux années précédentes. Au cours de celui-ci, la formation a été discutée pour 78 % des femmes et 81 % des hommes.
  • 5 % des femmes et 3 % des hommes ont suivi une formation hors temps de travail.
  • 71 % des femmes souhaitent se former dans les cinq prochaines années contre 66 % des hommes.

3. Égalité d’accès à la formation professionnelle : quelles pistes d’actions ?

3.1 Penser et intégrer la question de l’égalité dans toutes les politiques publiques de formation ou stratégies des entreprises

  • S’assurer de disposer des données sexuées et d’analyse genrées dans l’ensemble des politiques publiques.
  • Progresser en matière de budgets intégrant l’égalité femmes-hommes.
  • Produire et diffuser des guides de bonnes pratiques.
  • Planifier un cadre décennal de formation intégrant l’approche genre avec objectifs d’actions et indicateurs de suivi.
  • Promouvoir la formation professionnelle continue à travers le financement des frais annexes notamment de gardes d’enfant.

3.2 Éduquer les prescripteurs et responsables des politiques publiques de formation afin de garantir un accès égal à la formation lors de leur mise en œuvre

  • Organiser une campagne d’envergure nationale de communication, d’information et de formation des femmes sur les droits des femmes à la formation.
  • Renforcer les actions d’information et de sensibilisation en lien avec la mixité des filières de formation dans les collèges et lycées. L’objectif est d’inciter autant les filles que les femmes à s’orienter vers les métiers techniques et scientifiques.
  • Inciter les entreprises à créer des opportunités de stage en lien avec les métiers techniques et scientifiques et veiller à garantir une intégration réussie pour les filles.
  • Inciter les missions locales à présenter des offres de formation techniques aux femmes et à proposer une remise à niveau ou des modules de formation en mathématique et en sciences si nécessaire.
  • Mettre en place un module de formation à l’égalité professionnelle à destination des personnels de l’éducation, de l’orientation et de la formation.

3.3 Assurer l’égalité dans les formations aux évolutions des métiers existants et aux nouveaux métiers

  • Inciter les demandeuses d’emploi à se former aux métiers en tension.
  • Favoriser le choix par les femmes des formations garantissant une carrière évolutive.
  • Profiter des évolutions profondes de métiers existants pour former plus de femmes à des fonctions plus qualifiées.
  • Mettre en place des modules de formation à la création et gestion des entreprises et expérimenter de nouveaux modèles d’auto-entreprenariat ou de microcrédit.
  • Repérer les métiers d’avenir et proposer systématiquement aussi bien aux femmes demandeuses d’emploi qu’en reconversion professionnelle des formations adéquates conduisant vers ses métiers.

3.4 Faciliter le suivi des formations par des femmes

  • Créer des modules de formation « intelligents » : formations en ligne, alliant présence virtuelle et en ligne.
  • Créer un simulateur de formation professionnelle simple et neutre.
  • Favoriser l’accès des femmes à des formations professionnelles continue à des moments clés de leur carrière notamment après le congé maternité.
  • Faciliter l’accès des seniors salariés aux dispositifs de formation professionnelle continue.
  • Construire des parcours permettant d’accroître par la formation professionnelle continue la qualification de femmes exerçant des métiers féminins.
  • Promouvoir la VAE comme moyen de valorisation des compétences acquises informellement par des femmes.
  • Promouvoir des actions favorisant la formation et l’évolution de carrières des femmes qui exercent des métiers à dominance féminine (ATSEM, aides-soignantes).

3.5 Rompre la trappe à inégalité que peut représenter le temps partiel

3.6 Informer les femmes sur leur droit à la formation tout au long de la vie

3.7 Accroître la promotion du conseil en évolution professionnelle et s’assurer que les conseillers intègrent l’approche genre dans leurs actions

3.8 Évaluer avant de réformer

3.9 Créer des réseaux d’appui aux femmes (aux jeunes issus de la diversité, aux jeunes en situation de handicap…) rassemblant les différents acteurs emploi-formation et réfléchir à leur pérennité

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